Harry Potter, les moldus en sont mordus
Harry Potter fait plus que jamais partie de l’actualité. La toute première de la pièce de théâtre, Harry Potter and the Cursed Child (en français Harry Potter et l’enfant maudit), qui conte les histoires du sorcier dix-neuf ans après, a été jouée le 7 juin. Depuis le 30 juillet elle est jouée régulièrement à Londres. Début aout, elle est sortie en librairie provoquant, une fois de plus, un raz de marée. Les fans de la saga Potter n’ont pas attendu l’arrivée du jeune sorcier sur les planches pour perpétuer ses aventures. Ils débordent d’imagination, jusqu’à adapter son univers dans la réalité.
an ou pas du sorcier à lunettes, on se rappelle tous de son sport préféré : le quidditch (prononcez « kouiditche »). Qui n’a jamais rêvé de chevaucher un balais volant comme Harry Potter ? D’attraper le Vif d’or sous les hourras de la foule ?
Aujourd’hui, c’est possible. Le sport préféré des sorciers a été revisité et adapté par des moldus (personnes dépourvues de pouvoirs magiques dans les livres de J. K. Rowling). Sans magie mais toujours avec des balais. En France, la Fédération du quidditch français (FQF) a même été fondée en octobre 2014. Celle-ci a pour vocation de soutenir les équipes françaises dans leur développement. Elle les représente également à l’international, auprès des fédérations étrangères et de l’International quidditch association (IQA).
Dans plusieurs villes de France des équipes ont vu le jour, comme celle des Magyars à Pintes à Tours. Héloïse et Yann, à l’origine de sa création, ont enfourché leurs balais pour organiser les premiers entraînements, le 16 avril 2016. « L’équipe de Nantes est venue pour nous coacher, commente Héloïse. Cela m’a conforté dans mon envie de jouer au quidditch et de créer une bonne équipe sur Tours. Maintenant que nous avons une base, les choses sérieuses vont pouvoir commencer. »
Parmi les membres de cette nouvelle équipe, Aiko, 19 ans. Originaire de Blois, elle a découvert Harry Potter à l’âge de 14 ans. Le monde des sorciers l’a immédiatement fascinée : « J’ai lu chaque tome trois fois. En ce moment, je les relis en anglais. » Elle a découvert le quidditch moldu à l’occasion du Bal des sorciers. Cet événement, organisé chaque année par l’association Magical Events, réunit de nombreux fans autour d’activités sur le thème d’Harry Potter.
En 2015, il avait lieu au château de Blois et avait attiré plus de 230 personnes. Pour l’occasion, tous les participants s’étaient déguisés. Aiko avait fabriqué elle-même sa tenue d’élève de Serpentard. « J’ai trouvé un tutoriel sur Internet pour fabriquer une cape de sorcier. J’ai acheté des tissus noir et vert (couleurs de Serpentard, NDLR) et j’ai cousu. » Sur place, elle a acheté une cravate et une écharpe aux couleurs de sa maison préférée. Une façon pour elle de vivre pleinement une passion que son entourage a « parfois du mal à comprendre ».
« La fanfiction a une dimension thérapeutique »
Sébastien François, sociologue
Aiko s’adonne également au « role play » (ou jeu de rôle) sur Internet. C’est une pratique qui permet à des passionnés d’une œuvre d’incarner des personnages, que ce soit un protagoniste de leur fiction préférée ou un personnage inventé par leurs soins. La jeune femme participe depuis quelques années à un role play Harry Potter : « Le but est de créer un profil Facebook selon les attributs de notre personnage : âge, sexe, maison à laquelle il appartient, caractère… Ensuite quelqu’un poste un morceau d’histoire qu’une autre personne va enrichir et ainsi de suite, jusqu’au dénouement du récit », expose-t-elle.
C’est en ligne que les fans se retrouvent, échangent mais surtout entretiennent le mythe du jeune héros à la cicatrice en forme d’éclair. Pour faire vivre ou revivre les aventures de l’apprenti sorcier, rien de tel que de s’approprier son univers et de réécrire son histoire : bienvenue dans le monde de la fanfiction.
Apparue en même temps que des sagas tels que Star Trek, Le Prisonnier ou encore Star Wars, ces courts romans ont d’abord été d’abord publiés dans des « fanzines ».
Internet a rapidement globalisé le concept et a surtout permis de le propager dans les communautés de fans. Le principe : choisir un lieu, une temporalité et des personnages issus d’une saga puis inventer un récit avec des éléments de l’œuvre originale.
Les fanfictions sur Harry Potter sont parmi les plus répandues. Dans le monde, on compte environ 170 000 auteurs sur ce thème. Elles représentent un lieux où chacun peut s’exprimer, s’émanciper. Il est possible d’y affirmer sa personnalité par la créativité et de s’évader un instant de la réalité.
Sébastien François, sociologue, a étudié ces communautés. « Il y a un collectif qui fonctionne avec des échanges. Les auteurs proposent les fictions, ils attendent des retours de leurs lecteurs. Cela crée du lien social », explique-t-il avant d’ajouter que pour certains elles sont un véritable exutoire. En suivant les conversations sur les forums, le sociologue a pu assister à des débats sur des sujets très graves, tel que la violence ou encore le viol. « La fanfiction a une dimension thérapeutique que je ne connaissais pas », reconnaît-il. Selon ses observations, les membres de ces communautés s’encouragent ou au contraire se critiquent vivement. Dans tous les cas, « les liens, même virtuels, sont très forts ».